Le Temps de Chanter...
festival de musique liturgique juive

Après l’émancipation, les divergences entre les différentes communautés juives de Hongrie se sont aggravées, conduisant à un schisme qui représente un cas unique dans l’histoire du judaïsme mondial. En 1868, un congrès de toutes les communautés juives décida d’ouvrir un séminaire rabbinique moderne, en conséquence de quoi les éléments orthodoxes firent sécession, laissant la majorité adopter une position modérément réformée, connue sous le nom de néologie, un particularisme du judaïsme hongrois. Ce mouvement diffère des mouvements libéral et conservateur répandus dans d’autres pays. L’écrasante majorité des Juifs hongrois s’inscrivent encore aujourd’hui dans ce mouvement et la plus grande synagogue d’Europe, la Grande Synagogue de Budapest, est également «néologue». L’une des particularités de ce mouvement se trouve dans la pratique musicale : à la Synagogue de la rue Dohány, contrairement aux synagogues traditionalistes et orthodoxes où, depuis la destruction du Second Temple, les instruments de musique ainsi que les voix féminines sont interdits, l’office est accompagné par l’orgue et par un chœur mixte.
Le dernier concert de notre série présente les traditions musicales de la communauté hongroise, interprétées par les deux hazanim attitrés de la Grande Synagogue et le Chœur Goldmark du Séminaire rabbinique-Université Juive de Budapest.
Par ce concert, nous rendons un hommage particulier au compositeur, professeur et chef de chœur, Emil Ádám (1905-1987), le fondateur du Chœur Goldmark. Entre 1925 et 1944, Emil Ádám enseigne la musique au Collège Juif de Debrecen, dirige les chœurs de la synagogue principale et du Cercle choral des Jeunes Juifs Israélites de la même ville. Il effectue plusieurs voyages dans les régions subcarpathiques et dans les villages de la Grande plaine hongroise où il collectionne et enregistre des mélodies populaires et des chants yiddish et hassidiques de cette population juive qui va bientôt périr dans les camps nazis. Après la guerre, il tente encore de ressusciter la vie musicale juive, mais le régime communiste (sous lequel il enseigne au Conservatoire Franz Liszt), l’empêche de se consacrer à cette activité.
Après sa retraite, Emil Ádám recrée, au Séminaire Rabbinique, le département de hazanout, supprimé après la guerre. Il peut alors à nouveau enseigner l’art du chant synagogal et, en 1967, il met sur pieds le Chœur Goldmark.
Le riche répertoire de ce chœur comprend, outre des compositions de son fondateur, des prières quotidiennes et celles des fêtes, des chants liturgiques traditionnels, des chansons populaires yiddish et hassidiques et des œuvres de nombreux compositeurs hongrois. Le répertoire est enrichi par quelques chants folkloriques hongrois devenus partie intégrante du rituel de certains mouvements hassidiques. Au fil des années, des œuvres musicales originales ont été créées pour et par le chœur : notre programme présentera trois mouvements d’une Cantate de Psaumes pour solistes et chœur mixte, accompagnés par le compositeur László Király et interprétés par le Chœur Goldmark et ses solistes-hazanim, sous la direction de Mária Ádám, la fille du fondateur.